vendredi 13 septembre 2013

Brazil 13/14. Foz do Iguaçu





La jeune femme est figée dans son sommeil.
Statue antique, irréelle et sublime.

Un drap recouvre et entoure son corps, créant de multiples pliures, comme autant d
fissures noires sur le blanc du décor. La tête posée sur un oreiller, ses bras reposent 
élégamment hors du linceul. La scène est délicate, superbe.

Le visage de la jeune femme est caché par un masque étrange, amalgame d’ailes 
de papillon et de plumes d’oiseaux inconnus. L’ensemble happe le regard et le perturbe. 
Ce voile hétéroclite crée une percée dans la vision par son écorce aux couleurs vives, à l’inverse 
des contrastes francs de noir et de blanc qui caractérisent le reste de la scène.

La jeune femme rêve.

De nouvelles images se créent. Les pages se tournent, semblent hésiter, flottent 
avec insouciance au rythme de la conscience de la gracieuse endormie. Puis, 
l’engrenage s’arrête. Un choix semble avoir été accompli.




La scène se dévoile lentement, avec hésitation, puis se révèle et se dessine au 
regard et à la compréhension. Le songe se déroule à présent dans ce qui semble 
être une forêt, traversée par un courant d’eau, blanc et vide qui coupe la végétation 
et la page en deux. Des murmures d’oiseaux se font entendre parmi les branches. 
Le lieu est calme et apaisant.

Mais la conscience de la jeune femme ne s’arrête pas là et change déjà de sujet 
de représentation. Pourtant, elle n’avait pas encore achevé la définition de l’ancien 
lieu, seulement esquissé avant de disparaître.

Une plante aux nuances complexes de gris apparaît alors. Elle s’ébauche et se 
précise petit à petit, du haut de l’image jusqu’en bas. Ses feuilles bruissent au rythme 
d’un vent qui ne semble exister qu’en ce morceau de visibilité, tant ce qui entoure
 la plante est vide et indéfini. Elle semble révéler ou contenir quelque chose. Il est 
difficile de savoir quoi. Image inconsciente de la réalité de l’endormie, elle existe 
devant le regard en tant que microcosme de l’âme. Le monde entier se résume 
entre les nervures des feuilles, ces fleuves coulant aux origines de l’univers.




A nouveau, l’image entame sa métamorphose avant d’avoir été pleinement définie. 
C’est un rite étrange. Les lieux semblent se créer au fur et à mesure qu’évoluent 
les pensées de la jeune femme. Ils naissent du néant, jardins vierges et magnifiques 
et se transforment au gré des aléas de l’inconscient.

Une idée se crée alors. Peut-être est-ce cette jeune femme, la conscience de 
l’étrange carnet noir ? Peut-être que le voyage au sein des pages qu’accomplit l’homme 
depuis tant de jours est créé, nuit après nuit au sein même des songes de l’endormie ? 
Elle est l’arbitre sublime qui règne sur ce monde.

Le carnet noir se referme.



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